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visiteurs Le 23/12/2022 à 09h55 |
Le village - D comme Désertification
D comme Désertification : Épehy avant la désertification
Cet article présente une impressionnante image de la vie économique du village en 1969. Nous la devons à Claude Saunier à qui un ami avait prêté un Annuaire de la région de Péronne dont il a eu alors la bonne idée de recopier les pages concernant notre village. Désertification : le mot est-il trop fort ? Certes ce document de 1969 signale qu'Épehy compte 1175 habitants, alors qu'aujourd'hui (2012) nous en sommes à 1208, c'est-à-dire 33 de plus. Mais ce que nous appelons ici désertification n'est pas la diminution de la population résidente, mais celle des diverses activités économiques exercées au village par cette population. De ce point de vue, les années 1969-1970 semblent bien marquer à la fois un maximum et aussi un tournant, celui du début d'un déclin économique local qui fait que désormais l'activité professionnelle des Épéhiens va de moins en moins trouver sa place dans le cadre du village, mais bien plutôt et façon habituelle, dans les villes des environs. L'expression "village-dortoir" est-elle, elle aussi, trop forte pour qualifier la situation actuelle à laquelle a abouti cette évolution ? Voici donc la liste des différents corps de métiers et services alors existant à Épehy, ainsi que celle des personnes qui les exerçaient : Agriculture et activités dérivées : Agriculteurs : Baudelot Arthur, Capart René, Cnockaert Léon, Cocrelle Roger, Corbeaux Edgar, Dahèse, Despagne Augusta, Devillers Pierre, Dobbels Georges, Drapier, Droulez-Baudelot, Grière, Vve. Groenen, Gyselynck Jérôme, Herlemont René, Joffrin Henri, Lempereur Georges, Lesage, Loiseaux René, Loy Albert, Marquant Marcel, Marquant Sylvain, Martin-Lemarié Roland, Nobécourt Léone, Pertriaux Charles, Pertriaux André, Piermant, Thiéry Paul, Varlop Jean, Vasseur-Copin Gabriel, Vasseur-Lempereur. Activités dérivées : Battage et Travaux : Delaplace Onésime, Drapier Pierre Charron : Censier Joseph Engrais : Canipel Grainetier, horticulture : Delaporte
Alimentation et Boissons Bières : Bulan François, Hibon, Prévost Jean Boucherie-charcuterie : Boulanger Hippolyte, Bray Jean, Sauvage Jacques Boulangerie : Carton, Coopérative Lenfant J. Cafés, Boissons : Boitel Claude, Collet Paul, Delauney Clotilde, Legrand Roger (& tabacs), Oger Jacques, Pouillaude Georges Épicerie : Boitel Claude, Familistère Lengrand, Coopérative Broda Antoine, Verdière Salaisons : Goffart, Salaisons de Picardie
Bâtiment Chauffage, Plomberie : Copin-Colmin, Copin-Despagne Hervé Couverture : Berthe Maurice Maçonnerie : Dotigny Arthur Marbrerie : Plisnier Victor Matériaux de construction : Santi Fernando, puis Jean-Pierre Peinture : Brouette Pierre, Wydra Georges
Commerce et Services Chapelier : Carpentier-Prévost Benoît Charbons : Canipel, Devos Michel Coiffure : Oger Jacques, Roland Serge Enseignes lumineuses : Hemmon & Jacquemin Quincaillerie : Copin-Colmin, Copin-Despagne Hervé Menuiserie : Ledez Représentation : Georges Pouillaude Serrurerie : Copin-Despagne Hervé, Despagne Guy & Fils, Housseman-Copin Gérard
Cycles, Garage & Transport Carrosserie : Despagne Guy Cycles, Motos : Isèbe Roland Garage : Housseman Gérard, Lobry André Transports : Lobry André, Santi Fernand
Hotellerie Hôtels : Hôtel de la Gare (Delauney Clotilde), Hôtel de Normandie (Mme Juste), Le Moineau blanc (Legrand Roger)
Production industrielle Briqueterie : Debus-Ethuin Tissage cablés : Trocmé Raoul
Santé Dentiste : Benoît Médecine : Coste Jacques, Delval Pierre Pharmacie : Pauchant Gaston Vétérinaires : Basquin René, Reuet Claude
On trouve donc dans la liste ci-dessus pas moins de 36 activités et services localisés à Épehy. Tout cela occupait ainsi sur place un total de 94 personnes , non compris les salariés éventuels.
À cette impressionnante gamme d'activités diverses de production ou de services, il convient d'ajouter tout ce qui concerne la gestion et l'administration des affaires du village, s'agissant tantôt d'activités bénévoles non rémunérées (ou symboliquement rémunérées), tantôt d'emplois administratifs salariés. En voici, pour 1969, la liste par grands secteurs :
Gestion de la Commune Maire : Gernez Honoré Adjoints au Maire : Devillers Pierre, Loy Didier Conseillers municipaux : Boitel Claude, Brouette Pierre, Delaplace Onésime, Despagne Monique, Devillers Pierre, Lecomte Pierre, Loiseaux René, Loy Didier, Marquant Guy Secrétaire de Mairie : Rayan (Lefèvre) Mauricette Garde champêtre : Toch René
Anciens Combattants Président : Lecomte Pierre
Chasse Président : Loy Didier
École Instituteurs : Moral Léon, Mlle Tartaux
Église catholique Curé : Abbé Baisez André
Gare SNCF Chef de Gare : M. Proy
Hospice Camus Directeur : C. Bliot
Perception Percepteur : M. Boitel
Pompiers Sous-Lieutenant : Boniface Louis
Postes Receveur : M. Faucoeur
En guise de conclusion Aujourd’hui le village ne compte plus que 5 fermes (contre 31 en 1969) avec seulement 3 chefs d'exploitation1... Quant aux activités commerciales et artisanales, le site internet de la commune en signale actuellement 14 avec 17 personnes actives, au lieu de 36 avec 94 actifs en 1969. Cette évolution est, on le sait, celle de la majorité des campagnes de nos pays occidentaux. L'agriculture, de mode de vie y est devenue entreprise agro-industrielle productiviste, tandis que commerces et artisanats locaux n'ont pas pu résister à la concentration et aux économies d'échelle qu'elle permet, ni au dumping de la « course au moins disant » sur les prix. Mais ne nous leurrons pas : en 1969, cette évolution était bien entamée et avait déjà contribué à supprimer certaines activités autrefois prospères : ainsi les métiers de bourrelier ou de forgeron et maréchal-ferrant avaient-ils déjà disparu du village, victimes de la généralisation du tracteur, sans que rien d'autre ne les remplace localement. De même en fut-il des métiers de brasseur, tailleur, cordonnier et autres, dont on ne trouve déjà plus trace en 1969. Le fait que ces disparitions ne semblent pas avoir provoqué une diminution de la population peut paraître curieux. Que sont devenus celles et ceux qui travaillaient dans ces fermes, ces commerces et ces ateliers ? Même il s'agissait souvent d'une main-d’œuvre familiale, elle a bien dû chercher à s'employer ailleurs, et probablement en ville. Bien qu'il ne semble pas exister d'étude sur les mouvements migratoires qui ont spécifiquement affecté le village, on peut penser que l'émigration induite par cette disparition des activités locales s'est trouvée compensée par une immigration venue des villes dans le cadre de ce que des auteurs ont appelé la « rurbanisation »2. Dans la mesure où le village est à la fois proche de centres urbains, et reçoit l'apport résidentiel d'une nouvelle population principalement citadine, tout en conservant un espace non urbanisé largement dominant, on peut estimer qu'il appartient bien à une zone « rurbaine » telle que définie par ces auteurs. Ainsi, ce que J.F. Gravier écrivait à propos des campagnes auvergnates s'applique aussi bien aux nôtres : « Ces campagnes... reprennent vie parce que la réduction des effectifs agricoles y est compensée par l'installation d'ouvriers et d'employés – voire de patrons et de cadres – qui travaillent en ville tout en préférant le mode de vie rural »3. Ajoutons à l'arrivée de ces nouveaux ruraux en âge d'être actifs, l'installation de retraités désireux de profiter du bon air et du calme de la campagne, et nous aurons sûrement une assez bonne idée du profil socio-économique de la population de notre village et aussi des avantages et des services qu'elle s'attend à y trouver.
1 Voir sur le site l'article "F comme Fermes", dans Abécédaire > le Village, et le site de la commune : Epehy (Épy), village de Picardie : http://epehy.jimdo.com 2 Bauer G., Roux J.M., 1976, La rurbanisation ou la ville éparpillée, Ed. Du Seuil, Paris. 3 Gravier J.F.; Paris et le désert français en 1972, Flammarion, Paris.
Date de création : 07/05/2013 @ 18h26 Réactions à cet article
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